12XU
2016

Exposition personnelle, galerie Allen

Idiotsaintkrazy
Marie Béchetoille

12XU. Le titre de la première exposition personnelle de Boris Achour à la galerie Allen résonne comme un rébus. Une suite de chiffres et de lettres hurlés au début d’une chanson punk donne à entendre l’énergie adolescente, sa violence et sa puissance désirante. Dans le travail de Boris Achour, souvenirs personnels et mémoire collective se superposent. Des «objets-fictions» composent un puzzle dont les morceaux ne peuvent a priori s’accorder. Chacun est à la fois une énigme et un message. Mais si la règle du jeu a disparu, il est alors possible d’en réinventer plusieurs. Opérer de nouvelles rencontres entre les mots et les formes à travers des systèmes combinatoires subjectifs. Icône, indice, symbole, Boris Achour aime brouiller les signes. En cultivant les doubles jeux, il évite la vacuité d’une unique vérité et l’autoritarisme annihilant pour y substituer le trouble fictionnel du syncrétisme. Une stratégie poétique de camouflage qui demande de prendre le temps du décryptage ou peut-être simplement d’accepter le côté absurde de ces présences fragmentées…
News from Friends (Mike Kelley), 2016, carte postale
News from Friends (Marcel Broodthaers), 2016, carte postale

 

Tranquillement assis sans rien faire. Les pattes d’un cool Krazy Kat «cartoonesque» en carton-pâte sont croisées. Cela semble d’abord une attitude de passivité, une préférence pour l’inertie à l’action. S’asseoir et ne rien faire. Robert Filiou dirait que c’est un poème d’action. Une action poétique. Une poésie en actes. Les œuvres de Boris Achour évoquent différentes relations au temps et invitent à un renversement de ce qui semblait établi, fixe et figé. Le « non » devient « oui » et cette inversion positive rappelle le concept spinoziste de Conatus, affirmation du désir, motif et leitmotiv de l’œuvre de l’artiste depuis ses débuts1. What Part Of Yes Don’t You Understand? Bruce Nauman parlait d’« un art qui agirait comme un coup de batte de base-ball en pleine face2 », Boris Achour quant à lui nous propose les deux en même temps. L’art et le désir forment une même entité qui produit de l’action, des mises en mouvement et de nouvelles relations…
Tranquillement assis sans rien faire 1, 2016, papier mâché, peinture acrylique, mélaminé.
Tranquillement assis sans rien faire 2, 2016, papier mâché, peinture acrylique, mélaminé.
Tranquillement assis sans rien faire 3, 2016, papier mâché, peinture acrylique, mélaminé.
Tranquillement assis sans rien faire 4, 2016, papier mâché, peinture acrylique, mélaminé.
Tranquillement assis sans rien faire 5, 2016, papier mâché, peinture acrylique, mélaminé.
News From Friends. Avec humour et nostalgie, Boris Achour convie les fictions des autres. Dans la solitude de l’atelier, des artistes admirés deviennent des amis imaginaires et imagés. Fan de. Si l’artiste et son œuvre se confondent souvent, Boris Achour échappe aux définitions en procédant par figures de substitution. À coups de métonymie, synecdoque et périphrase, il produit des combinaisons manquantes. Il est nulle part et partout à la fois. Il est le scénariste, le metteur en scène et tous les personnages, mais s’arrange pour qu’on ne le voie pas. Au fil de ses « expositions-épisodes » un portrait en creux se dessine pourtant. La fin reste ouverte, le cliffhanger ne trouvera pas de résolution dans le prochain épisode ni dans les suivants. Car l’éclectisme fictionnel de Boris Achour réaffirme sans cesse la pluralité des désirs, dont les incohérences construisent des rencontres et nous font devenir sujets. « Une fiction permet de saisir la réalité et en même temps ce qu’elle cache3».
1 La première exposition de Boris Achour à la galerie chez Valentin à Paris en 1997 s’intitulait «Oui».
2 « Dès le début j’ai essayé de voir si je pouvais réaliser quelque chose qui produirait cet effet. Un art qui surgirait comme ça tout d’un coup. Un art qui agirait comme un coup de batte de base-ball en pleine face. Ou mieux, un art qui agirait comme un coup sur la nuque qu’on ne voit pas venir et qui vous étend. Une espèce d’intensité qui ne s’expose pas au jugement et à l’appréciation. » Joan Simon, entretien avec Bruce Nauman, «Rompre le silence» in Bruce Nau- man, Image / texte 1966-1996, Paris, Centre Georges Pompidou, 1997, p. 107.
3 Marcel Broodthaers, communiqué de presse, Documenta 5, Kassel, Juin 1972
Histoire de la solitude, 2016, horloge modifiée
‘s not dead, 2016, cintre
What Part of Yes don’t you understand, 2016, batte de baseball gravée
Ensemble des peintures/titres
12XU, 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’exposition
NFF (MK) 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’œuvre News from friend (Mike Kelley)
NFF (MB), 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’œuvre News from friends (Marcel Broodthaers)
‘SND, 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’œuvre ‘s not dead
HDSL, 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’œuvre Histoire de la solitude
WPIYDYU, 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’œuvre What Part Of Yest Don’t You Understand ?
TASRF1, 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’œuvre Tranquillement assis sans rien faire 1
TASRF2, 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’œuvre Tranquillement assis sans rien faire 2
TASRF3, 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’œuvre Tranquillement assis sans rien faire 3
TASRF4, 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’œuvre Tranquillement assis sans rien faire 4
TASRF5, 2016, acrylique sur papier marouflé sur aluminium, 32x32cm. Simultanément une peinture autonome et le titre de l’œuvre Tranquillement assis sans rien faire 5